Lieu de travail multigenerationnel avantages employeurs

Pour un milieu de travail intergénérationnel

J’étais au début de la vingtaine quand je me suis jointe à une firme-conseil en transition de carrière. J’arrivais de la banlieue et j’avais une grande ville et un monde du travail à découvrir. Mon patron était le copropriétaire de l’entreprise. Moi, je commençais ma carrière et lui était en train d’écrire le dernier chapitre d’une carrière qui s’étalait sur plus de quatre décennies. Cette relation professionnelle a eu un grand impact sur ma carrière. Il a été un supérieur, mais aussi un guide et un mentor.

Son enthousiasme pour le travail était contagieux. La satisfaction du client était au centre de ses préoccupations. Il travaillait avec acharnement pour assurer la prospérité de l’entreprise qu’il avait contribué à bâtir avec son fils. Il aimait partager son savoir et son expérience et prodiguer des conseils avisés à ceux qui lui en demandaient.

À son contact, j’ai beaucoup appris : l’importance de s’investir dans son travail, de toujours donner le meilleur de soi, d’offrir un service à la clientèle hors pair et de travailler avec acharnement tout en s’amusant. Travailler avec lui a contribué à mon développement professionnel et à l’établissement de mon éthique et de mes valeurs au travail.

Tout au long de ma carrière, j’ai cherché auprès de collègues plus âgés et expérimentés les réponses à mes nombreuses questions. J’ai voulu m’abreuver à leurs puits de connaissances dans le but d’apprendre et de m’améliorer.

Si je n’avais vu que les cheveux gris et les rides au visage, je n’aurais pas vu tout ce que ce supérieur pouvait m’apporter : le goût du travail bien fait, la connaissance des meilleures pratiques, l’importance du travail en équipe. Mais surtout, il m’a enseigné qu’il est possible de faire une différence grâce à notre travail. Une attitude âgiste m’aurait privé non seulement de son savoir, mais aussi de belles interactions.

L’âgisme, vous connaissez?

L’âgisme n’est pas un phénomène nouveau. En fait, le terme a été créé en 1969 par le gérontologue américain Robert Butler. Au départ, l’âgisme référait aux discriminations touchant les personnes âgées. Aujourd’hui, il est employé pour toutes les personnes qui en sont victimes, quel que soit leur âge. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), « l’âgisme regroupe les stéréotypes (la façon d’envisager l’âge), les préjugés (ce qu’inspire l’âge) et la discrimination (la façon de se comporter), dont on est soi-même victime ou dont autrui est victime en raison de l’âge. »

Lorsque nous affichons des préjugés ou une attitude discriminatoire envers des personnes plus âgées, nous oublions une réalité pourtant inéluctable : personne ne demeure éternellement jeune. Le jeune travailleur d’aujourd’hui sera le travailleur d’âge mûr de demain.

L’OMS offre des statistiques révélatrices sur le vieillissement de la population:

« Entre 2015 et 2050, la proportion des 60 ans et plus dans la population mondiale va presque doubler, passant de 12 % à 22 % et d’ici à 2030, une personne sur six dans le monde aura 60 ans ou plus. »

Avons-nous le luxe de nous priver des connaissances, des compétences et de l’expérience d’autant de gens?

Voir au-delà de l’âge en tant qu’employeur

Comme dans le reste de la société, le marché du travail actuel connaît des bouleversements importants. Quatre générations différentes y cohabitent en même temps : les baby-boomers (1946-1964); la génération X (1965-1980); les milléniaux (1981-1996); et la génération Z (1997-2005). Une récente étude de Robert Half, intitulée Étude de la main-d’œuvre multigénérationnelle, brosse le portrait des besoins et motivations des quatre générations.  Lire sur les générations jette un nouvel éclairage sur chaque groupe et ce qu’ils peuvent apporter dans un milieu de travail.

Malgré une pénurie de la main-d’œuvre, plusieurs entreprises hésitent encore à embaucher des travailleurs d’âge mûr. Pourtant, selon un rapport publié en juillet 2023 par Telus Santé, « les travailleurs de moins de 40 ans sont 60 pour cent plus nombreux que ceux de plus de 50 ans à envisager de quitter leur poste. Ces mêmes travailleurs de 40 ans et moins sont deux fois plus nombreux que ceux de plus de 50 ans à indiquer un changement d’emploi au cours de la dernière année. »

Plutôt que de percevoir la valeur des gens en fonction de leur âge, ne serait-il pas préférable de réaliser ce qu’ils peuvent apporter? Dans le cas des travailleurs d’âge mûr, on peut mentionner : l’expérience et l’expertise acquises après avoir été confrontés à un éventail de défis et situations; le professionnalisme; l’éthique; le dévouement; l’assiduité au travail; la fiabilité; la confiance en soi, etc.

La nécessité de rester pertinent pour les candidats

Le défi des travailleurs d’âge mûr est de démontrer qu’ils ont encore leur place sur le marché du travail et que les stéréotypes véhiculés à leur sujet ne s’appliquent pas nécessairement à tous les individus.

1) Gardez vos compétences à jour. Si vous avez un travail, saisissez les occasions offertes par votre employeur pour acquérir de nouvelles compétences et perfectionner vos connaissances existantes.

Si vous cherchez à réintégrer le marché du travail, vérifiez les offres d’emploi qui vous intéressent pour connaître les compétences recherchées par les employeurs et suivez, au besoin, des cours de perfectionnement. Si vous êtes abonné à LinkedIn Premium, vous avez aussi accès à des milliers de cours de LinkedIn Learning portant sur une panoplie de sujets.

Mettez à jour les sections relatives aux études et aux certifications dans votre CV et votre profil LinkedIn.

2) Restez informé des tendances dans votre profession et votre industrie. À quand remonte la dernière fois que vous avez lu un article sur les derniers changements dans votre domaine? Êtes-vous membre d’une association, d’un ordre professionnel? Assistez-vous à leurs conférences, leurs formations? Tout le monde parle de l’intelligence artificielle. Connaissez-vous son impact sur votre domaine?

3) Montrez votre flexibilité et votre capacité d’adaptation. Si vous avez collaboré avec des équipes multidisciplinaires et multiculturelles, si vous avez agi comme coach ou mentor auprès de collègues plus jeunes, n’hésitez pas à le mentionner dans votre CV et votre profil LinkedIn.

En tant que cadre ou professionnel expérimenté, vous pouvez faire certaines choses pour vous assurer qu’un employeur potentiel est ouvert à embaucher un travailleur d’âge mûr.

1) Vérifiez les photos utilisées par l’entreprise sur son site Web et dans son matériel de marketing. Lorsque vous effectuez des recherches sur une entreprise cible, regardez comment elle se présente sur son site Web et dans son matériel de marketing. Si vous ne voyez que de jeunes gens, cela soulève certaines questions.

2) Décodez les offres d’emploi. Si l’entreprise présente sa politique de diversité, fait-elle référence à l’âge? Est-ce que le pronom personnel « tu » est utilisé dans le texte? Si oui, il y a de bonnes chances que l’entreprise cherche à recruter de jeunes candidats.

3) Parlez à vos contacts, aux employés (anciens ou actuels) d’entreprises cibles. Essayez d’en apprendre davantage sur la culture de l’entreprise. Est-elle ouverte à l’embauche de travailleurs d’âge mûr? A-t-elle une politique de diversité et d’égalité des chances qui englobe l’âge?

Faire ces démarches n’est pas une garantie absolue qu’une entreprise n’a pas des pratiques discriminatoires, mais elles vous permettront de voir dans quelle mesure la culture de l’entreprise est accueillante à l’égard des travailleurs d’âge mûr.

Tout au long de ma carrière, j’ai fait partie d’équipes où il y avait une mixité des âges. J’ai côtoyé des jeunes tout droit sortis de l’université, des trentenaires promis à un brillant avenir, des quadragénaires solides et fiables et des sexagénaires qui avaient encore la flamme et le désir de transmettre leur savoir aux autres générations. Je me considère privilégiée.

Les entreprises qui adoptent un lieu de travail intergénérationnel où la sagesse rencontre l’innovation et où l’expérience s’allie à de nouvelles perspectives se dotent d’un solide avantage stratégique. Ces entreprises ne se contentent pas de constituer des équipes ; elles tissent des tapisseries de talents à travers les âges, créant ainsi une culture organisationnelle plus riche et un avenir plus radieux pour tous. En tant que travailleur de 40 ans et plus, mettre vos compétences à jour et connaître votre valeur vous permettront de faire oublier votre âge aux employeurs potentiels.

Depuis sa création en 1990, La Passerelle, un organisme d’aide à l’emploi à Montréal, a aidé des milliers de travailleurs d’âge mûr à réintégrer le marché du travail par le biais de son programme d’aide à la recherche d’emploi et de coaching en gestion de carrière. La Passerelle soutient tous les efforts déployés pour lutter contre l’âgisme, car nous croyons fermement à l’égalité des chances et à la mixité des âges en milieu de travail.